Les entreprises développent régulièrement leur arsenal de primes pour les missions d’expatriation dites de long terme, soit de plus d’un an à l’étranger, qu’il s’agisse de primes de mobilité visant à compenser l’éloignement de son réseau social (famille, amis, collègues de travail) et la nécessaire adaptation au nouvel environnement culturel, des indemnités de coût de la vie permettant le maintien du pouvoir d’achat du salarié dans le pays d’accueil ou des primes de difficulté de vie lorsque le pays d’affectation présente un climat plus rude, une instabilité politique ou économique, un manque d’infrastructures hospitalières, scolaires ou encore de loisirs.

Moins connus sont les émoluments de rémunération plus spécifiquement destinés aux missions ponctuelles hors de France. Il existe en effet des possibilités de primes d’expatriation pour des salariés qui n’ont pas à proprement parler un statut d’expatrié mais qui réalisent des missions ponctuelles de plusieurs jours, semaines voire mois à l’étranger.

Ces compléments de salaire méritent que l’on s’y intéresse car ils bénéficient d’un traitement fiscal et social spécifique aussi avantageux pour l’employeur que pour le salarié.

Il convient de bien maitriser les conditions d’exonération fiscale voire sociale afin d’en faire un véritable avantage en terme de marque employeur sans risquer le redressement en cas de contrôle des autorités.

2 types de primes peuvent être versées par l’employeur. Le traitement social et fiscal dépendra de la vocation de ces compléments de rémunération.

L’intitulé de ces gratifications varient beaucoup selon les entreprises : « indemnités forfaitaires de grand déplacement », « per diem », « allocations forfaitaires pour frais professionnels à l’étranger » voire «primes d’expatriation » quand bien même le salarié ne sera pas expatrié et se limitera à des déplacements de quelques jours hors de l’hexagone.

Lorsque le service des Ressources Humaines donnera les instructions au gestionnaire de paie pour passer ces primes, il devra impérativement préciser la finalité de chacune d’elle afin qu’elles bénéficient des bonnes exonérations fiscale et/ou sociale.

Certaines indemnités (le plus souvent libellées comme indemnités forfaitaires de grands déplacements ou per diem) ont pour objet de couvrir les frais de déplacement : transport, hôtel, restauration, taxis. Elles correspondent en principe à des dépenses réelles dans le pays de mission ou sont supposées être affectées aux frais à l’étranger en cas de versement d’un montant forfaitaire.

Aussi, elles sont exonérées de charges sociales en France et d’impôt français si elles restent d’un montant raisonnable. Notons qu’elles peuvent être chargées et taxées dans le pays de mission mais cela reste très rare.

Pendant le déplacement professionnel hors de France, l’employeur peut verser au salarié, en sus du salaire habituel, un forfait journalier, représentatif des frais de logement et de nourriture en alternative du remboursement de notes de frais au réel. Il ne peut superposer les 2 régimes.

A travers le barème Acoss, l’administration précise les plafonds journaliers pouvant être octroyés sans charge sociale, ni fiscale. Si ces montants sont relativement confortables, ils diffèrent pour chaque pays en fonction du coût de la vie du pays de mission (par ex : Allemagne : 164 € maximum par jour de présence sur place et non par journée travaillée, Italie : 220 €, USA : 320 USD).

Pour une mission de moins de 3 mois sur place, l’employeur procédera à l’exonération fiscale et sociale automatique du forfait journalier sans justificatif dans la limite du barème ACOSS ou barème de la Chancellerie sur la base des dites « indemnités journalières allouées aux personnels civils et militaires de l’Etat en mission temporaire dans les pays étrangers ».

Si l’employeur prend en charge les frais d’hébergement et ne verse qu’une indemnité destinée aux frais de bouche, le plafond exonéré est réduit de 65 %.

L’employeur peut verser des montants supérieurs au barème. Le cas échéant, la part excédant le plafond sera soumise à charges sociales françaises et à l’impôt sur le revenu sauf si le salarié produit des factures justificatives du coût réel engagé (ce dernier devra toutefois être raisonnable).

Lorsque la mission se prolonge au-delà de 3 mois dans un même pays, le montant des indemnités exonérées subit un abattement de 15 % à compter du 1 er jour du 4 ème mois et ce, dans la limite de 2 ans depuis le début de la mission.

Au-delà de 2 ans de mission sur cette même destination, l’exonération des indemnités est minorée de 30 % à compter du 1 er jour du 25 è mois et ce, de nouveau pour 2 ans. Notons que cette situation reste rare puisque les indemnités sont confortables, aussi au-delà d’une certaine durée de mission dans le pays d’accueil, l’entreprise aura tendance à passer sur un autre mode de rémunération moins onéreuse (cf notre article « Comment gérer la rémunération des missions court terme qui se prolongent ? »).

Notre recommandation : comme précédemment mentionné, les plafonds étant généreux, nous suggérons de verser d’emblée dès le 1 er mois de mission le montant maximum exonéré de charges sociales et fiscales moins 15 %. En effet, il s’avère peu motivant pour le salarié de percevoir une indemnité réduite de 15 % après 3 mois de mission pour des raisons fiscales et sociales.

Au-delà des prises en charge des frais occasionnés par le déplacement à l’étranger, l’employeur pourra verser une prime parfois appelée « prime d’expatriation » qui aura pour vocation à compenser la sujétion liée à l’exercice de l’activité à l’étranger (levée très matinal, retour tardif, efforts pour communiquer dans une autre langue, éloignement de son conjoint, de ses enfants, horaires décalés, climat plus difficile, …).

Cette prime, constitutive d’un sursalaire, pourra être épargnée ou dépensée à la guise du salarié. Aussi ne bénéficiera-t-elle que d’une exonération fiscale en France sous certaines conditions encadrées par l’article 81 A II du Code Général des Impôts français.

Assez facile à mettre en place, certains employeurs en font l’article lors de l’embauche pour attirer des talents polyglottes au profil internationaux.

Ce supplément devra

  • être proportionnel à la sujétion, le montant doit différer d’un pays à l’autre en fonction de critères objectifs (bien que l’administration ne donne pas de barème)
  • correspondre à un déplacement de 24 h sur place (hors temps de voyage)
  • ne pas dépasser 40 % de la rémunération brute (ni être calculé en dedans, soit être en sus)
  • apparaitre distinctement dans le contrat de travail ou dans un avenant au contrat de travail si mis en place a postériori de la date d’embauche
  • apparaitre de manière distincte du salaire fixe sur le bulletin de paie
  • être mentionné dans une rubrique spécifique de la DSN (Déclaration Sociale Nominative)

Enfin, le salarié devra garder tout justificatif démontrant ses déplacements à l’étranger (copies des cartes d’embarquement, factures d’hôtels / taxis / restaurant, …) et ce, pendant 3 ans plus l’année en cours (délai de prescription fiscale en France).

 

Soyons pragmatique, résumons

 

Type d’indemnité

 

 

Objet

 

Traitement social & fiscal en paie France

 

 

Référence juridique

 

Indemnité forfaitaire de grand déplacement

ou per diem

 

 

Couvrir les frais de déplacement : transport, hôtel, repas, taxis, …

 

 

Exonération des charges sociales & fiscales françaises sous certaines conditions

 

Barème ACOSS

 

Prime d’expatriation

 

 

Compenser la sujétion liée au travail

à l’étranger

 

 

Exonération des charges fiscales françaises uniquement sous certaines conditions

 

 

Article 81 A II

du Code Général des Impôts français

 

Des fonctionnements similaires doivent exister dans d’autres juridictions hors France, pour optimiser l’impact social et fiscal des primes pour le personnel amené à se déplacer à l’étranger dans le cadre de son travail.