Définir un package d’expatriation pour un collaborateur à qui l’entreprise propose une mission de plusieurs années à l’étranger exige un habile jeu d’équilibre pour les RH.

L’entreprise devra proposer des conditions matérielles comprenant une rémunération espèces (salaire fixe et primes) ainsi que des avantages en nature et des prestations de services motivantes pour répondre aux besoins du salarié tout en maitrisant le coût pour l’employeur.

Il n’est pas rare que le candidat à une mobilité internationale se présente avec sa liste au Père Noël après avoir fait sa petite enquête auprès de son réseau (famille, amis, …) ayant eu une expérience en expatriation.

Aussi, les ressources humaines devront suivre une démarche structurée pour limiter des négociations sans fin, les exigences de Diva et assurer l’équité entre salariés.

1/ Dans un premier temps, l’entreprise détaillera le package d’installation qu’elle souhaite offrir au futur expatrié. Il peut comprendre :

  • un voyage de reconnaissance dit « look & see trip » : le salarié et son conjoint, s’il y en a un, pourront aller passer 3 à 5 jours dans le pays d’accueil afin de rencontrer le futur manager et la nouvelle équipe pour valider le contenu de la mission puis repérer le nouvel environnement de vie avant de confirmer l’acceptation de la mission. Lors de ce voyage, pris sur le temps de travail, l’employeur financera le vol, l’hôtel, la restauration et les frais de taxis
  • les formalités d’immigration : honoraires du consultant en immigration et du traducteur assermenté si besoin
  • la visite médicale de toute la famille dans un centre spécialisé
  • l’hébergement temporaire dans le pays de départ (sur une semaine maximum) et / ou dans le pays d’accueil jusqu’à un mois le temps que le déménagement arrive
  • les formations linguistiques et/ou interculturelles selon le besoin
  • les honoraires de l’agence de relocation qui accompagnera le salarié dans sa recherche de logement, l’analyse du bail, l’ouverture du compte bancaire, l’éventuelle inscription des enfants à l’école
  • les frais d’agence immobilière voire l’avance de la caution
  • le déménagement
  • les honoraires de l’avocat fiscaliste pour les entretiens fiscaux de départ du pays d’origine et d’arrivée dans le pays d’accueil
  • une prime d’installation

2/ Dans un second temps, l’entreprise définira le type d’ancrage permettant le calcul de la rémunération internationale. Il existe, en effet, 4 méthodes de calculs de la rémunération espèces :

  • L’ancrage pays d’origine ou balance-sheet (courbe en U), le principe est de compenser ce qui est à compenser pour maintenir le pouvoir d’achat du salarié quel que soit le pays d’affectation.
L’employeur part du salaire brut qu’aurait perçu le salarié dans le pays de départ pour le même niveau de poste que celui tenu dans le pays d’accueil.
– De ce salaire sont déduites les charges sociales salariales qu’aurait payé le salarié s’il avait travaillé dans le pays de départ ainsi que l’impôt qui aurait été payé dans ce pays.
+ Certaines entreprises ajoutent le montant des allocations familiales si le salarié n’en bénéficie plus en expatriation.
= Cela permet d’obtenir un salaire net à garantir dans le pays d’accueil.
+ Puis l’employeur va ajouter une indemnité de coût de la vie lorsque la vie est plus chère dans la ville d’accueil par rapport à celle de départ.

*Afin d’être parfaitement objectif, les entreprises achètent les indices de coût de la vie auprès de sociétés spécialisées dans l’étude des niveaux de vie dans le monde.

+ Parfois les conditions de vie au pays d’affectation se révèlent plus rudes (climat, stabilité politique et économique, difficulté de la langue locale, manque d’infrastructures hospitalières / scolaires / de loisirs / de services publics, …) alors le salarié peut bénéficier d’une prime de difficulté de vie.
ð  Au salaire net social et fiscal à garantir dans le pays d’accueil plus l’indemnité de coût de la vie et / ou la prime de difficulté de vie le cas échéant seront ajoutés les charges sociales salariales et l’impôt du pays d’accueil pour déterminer le salaire brut d’expatriation.

 

  • L’ancrage pays d’accueil: le salarié percevra la rémunération (fixe et bonus) qui serait versée à un salarié local pour le même poste quel que soit le niveau de salaire au pays de départ. Ce mode de rémunération est simple à administrer. Il ne nécessite pas l’achat d’indices de coût de la vie mais reste applicable uniquement dans les pays dits « compatibles », c.à.d à  pouvoir d’achat élevé et équivalent (soit principalement Europe de l’Ouest, USA, Canada, Japon et Australie).
  • L’ancrage hybride « the best of solution” : l’employeur procède au calcul des 2 méthodes de rémunération précédentes puis attribue la solution du net le plus élevé entre l’ancrage pays d’origine et celui du pays d’accueil.

 

  • La grille internationale: l’employeur liste tous les postes de l’entreprise et détermine un salaire net pour chacun d’eux, quel que soit le pays d’exercice puis il corrige ce net de l’écart de coût de la vie le cas échéant et rajoute les impôts du pays d’accueil pour déterminer le montant du brut à verser. Alignée sur les pays à haut niveau de salaire, cette méthode reste peu utilisée car assez couteuse.

Concernant la rémunération espèces, l’employeur devra définir comment gérer la part  variable qu’elle soit individuelle (le bonus) ou collective (la participation – intéressement).

Il développera le process d’augmentation de salaire tant pour le salaire effectivement perçu par le salarié que celui de référence permettant le retour dans la grille de salaire du pays de départ.

Enfin, il détaillera comment les fluctuations de taux de change seront gérés.

3/ Troisième étape, l’employeur définira les mesures d’accompagnement :

  • logement : 100 % pris en charge par l’employeur ou avec participation du salarié
  • scolarité : quid des prises en charge (frais de scolarité, uniformes, cantine, livres scolaires, bus scolaires, … frais pour les enfants restés au pays d’origine en sport études par exemple)
  • home leaves (= voyages annuels pour les congés) : nombre de voyages autorisés par an ou budget voyage, classe éco ou business, …
  • assistance fiscale à la déclaration d’impôt dans le Pays d’Accueil, voire dans le Pays de départ
  • accompagnement du conjoint : aide pour la recherche d’un travail à l’étranger, formation, cotisations retraite, …
  • garde-meubles
  • assurance rapatriement sanitaire et sécuritaire + responsabilité civile vie privée

Package au retour

  • Prime de re-installation
  • Voyage de retour
  • Déménagement
  • Hébergement temporaire

Depuis quelques années, nous voyons apparaitre le « core flex benefits package » à l’instar de ce qui se pratiquait dans les pays nordiques, aux USA, Canada ou en Europe du Nord.

Le salarié en mission à l’étranger bénéficie d’un socle commun et d’une flexibilité encadrée, très plébiscitée par les jeunes générations.

Tout expatrié reçoit un package d’installation complet afin de commencer à travailler rapidement dans le pays d’accueil. Il bénéficie d’une rémunération ancrage pays d’accueil dans les pays compatible ou bien d’un ancrage mixte dans les autres pays. S’ajoutent une bonne retraite via un fond de pension international et une couverture maladie privée ainsi qu’une assistance fiscale pour les déclarations d’impôt dans le pays d’exercice de l’activité.

Pour toutes les autres mesures d’accompagnement, le salarié bénéficie d’un système appelé « cafeteria plan ». Il dispose d’un budget annuel à utiliser parmi une liste d’avantages en nature selon ses besoins et sa situation  personnelle : voiture de fonction ou seconde voiture pour le conjoint, retour réguliers au pays d’origine, adhésion à un club de golf local, plus de cotisations retraite, …

Les montants non dépensés ne peuvent être versés en cash au salarié.

Compte tenu de la complexité du sujet, l’entreprise a intérêt à construire une politique de Mobilité Internationale encadrée dès lors qu’elle compte un nombre significatif de salariés en expatriation et ce, pour éviter la gestion au cas par cas très chronophage et la création de précédents.

Au-delà, d’un certain volume, il est possible de mettre en place une politique segmentée, autrement dit « à tiroirs » avec des packages spécifiques plus ou moins généreux en fonction du profil des salariés (par ex : emerging talents ou packages plus confortables pour les mobilités inter continents vs mobilité dans le monde continent). Il conviendra toutefois de ne pas utiliser de critères discriminants (âge, nationalité, …) et de ne pas multiplier les politiques au risque de dévoyer son objectif.

Lorsque l’entreprise revoit les conditions des packages, elle doit réfléchir à la gestion de la transition pour les situations en cours de mission.

Enfin, tout devra être clairement défini dans la charte de Mobilité Internationale et dans les contrats d’expatriation. Contracter, n’est-ce pas prévoir ?